CERU

Par Dr Bertrand Legrand

Le 8 novembre 2019 à 10h10

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La presse se délecte d’une étude sur le lien entre l’industrie pharmaceutique et les prescriptions des médecins. Et bien sûr on tape aveuglément sur l’ensemble des médecins !

La méthodologie de cette étude est intéressante, mais ses résultats sont compliqués à interpréter. Il manque en effet une donnée essentielle. Cette étude croise une base de données dans laquelle sont déclarés tous les dons déclarés en nature ou espèces dont bénéficient les médecins, et des indicateurs de qualité de prescription de l’Assurance Maladie.

Le groupe qui perçoit le plus gros montant de l’industrie pharmaceutique est aussi nettement plus masculin et a une plus forte activité de soins. Or ces deux caractéristiques sont exactement celles des médecins les plus âgés

Pyramide des âges des médecins généralistes source : medecindirect
Pyramide des âges des médecins généralistes source : medecindirect

(https://www.medecindirect.fr/…/Pyramide-des-âges-des-méde…).

L’article, qui est pourtant riche de détails, oublie tout simplement de mentionner l’âge des médecins… Nous pensons que les groupes de montants croissants déterminés par les auteurs sont des groupes d’âges croissants, mais qu’ils ont souhaité le dissimuler aux lecteurs.

Les « indicateurs de qualité » de l’Assurance Maladie disent tous la même chose.

Sur les onze indicateurs de qualité de prescription de l’Assurance Maladie, 5 portent sur la prescription de médicaments génériques, et les autres portent plus ou moins sur la reconduction systématique des ordonnances. L’autre indicateur est la conséquence directe de ce qui précède, il s’agit du montant moyen prescrit.

Cette étude nous montre donc tout simplement que les médecins les plus âgés prescrivent moins de génériques, et ont plus de difficultés à interrompre une prescription. Ces faits étaient déjà connus, mais sont bien éloignés de l’idée que des médecins seraient corrompus par l’industrie pharmaceutique.

L’étude indique clairement que l’état de santé des patients n’a pas pu être pris en compte, et qu’aucun lien de causalité ne peut être déduit de l’association statistique retrouvée.

De plus, le contenu de la base de transparence doit être interprété avec précautions.

Ainsi, par exemple, lorsqu’un médecin participe bénévolement à une journée de travail scientifique le weekend, mais que son billet de train est payé par le laboratoire organisateur, le billet de train est considéré comme un « avantage ». À cet égard le terme de « gift » employé dans l’article est assurément malhonnête. Le montant trouvé dans cette base est dans certains cas le simple reflet d’un engagement bénévole pour la collectivité. En revanche, lorsqu’un individu est en relation douteuse avec un laboratoire, la simple transaction via une association loi 1901 suffit à masquer totalement sa rémunération.

Au final, cette base est plus un traceur de l’implication pour la collectivité que de la prétendue corruption d’une profession. On peut regretter cependant qu’un tel outil n’existe pas pour certaines autres professions, comme, par exemple, les journalistes, ou nos élus.

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